.. Soudain, je pressentis qu’une grande pensée,
Présidait, invisible à leur effort géant,
Leur peine, en apparence inutile, insensée,
Tendait vers l’avenir, et non vers le néant ! (*)

A Alfred et Charles Bonzon,
En témoignage de reconnaissance et d'affection

" O Marmurè, quel pic fut plus aimé que toi ? " (**)

.

La légende du Balaïtous.
(" Ce que dit la Bouche de Lumière .. ")

Cependant qu'émergeant de la nuée furieuse,
Le Grand Balaïtous méditait gravement,
Il me vint à l'esprit cette pensée pieuse,
De ranimer la voix du souvenir d'antan :

" Toi, l'amant des Alpes, des lacs et du Mont-Blanc, "
" Tu n'a pas méprisé mes Pyrénées natales, "
" Et malgré ton amour des courses sans rivales, "
" Tu as donné du temps aux pics moins éclatants. "

" Parmi eux je revois le Grand Balaïtous, "
" qui domine de haut le glacier Las Néous, .. "(***).

Je contemplais ainsi la cheminée glacée,
Qui, du sommet neigeux, m’interdisait l’accès,
Quand soudain, remontant des entrailles du temps,
J'entendis martelé, sourdement, dans le vent,

Cinglé dans mon oreille par la neige et la glace,
Tandis qu'à la lumière, l'obscurité fit place,
Par une voix, grondant : " Dis à Charles Bonzon, "
" Que foin de modestie, il me rende raison ! "

" Mais qu’à tant de bonté, tout péché se pardonne, "
" Et qu’à tant de beauté, tout son amour il donne ! "..

Or voici que vibrant dans la clarté suprême,
La voix aimée reprit, dans le danger extrême :

" Toi, l’amant des Alpes, des lacs et du Mont-Blanc, "
" Toi aussi, aimeras, mes Pyrénées natales "
" Et fidèle à l’amour des courses sans rivales, "
" Tu graviras pour moi le pic de mes vingt ans. "

Aussitôt, me tendant une main secourable,
Le Grand Balaïtous, devers moi s'est penché,
Dans un puits de lumière, sans effort, élevé,
Me tira, à l'instant, en un lieu admirable

Où d'Ossau, Vignemale, Palas et de Bigorre,
Murmuraient, étonnés : Qu'est-ce encore ? Mais alors,
Le Grand Balaïtous pour nous a proclamé :
" Place à Charles Bonzon, place à ses invités ! "

(Balaïtous, Cheminée de Las Néous, 17 avril 1995, 14 heures) - Daniel Vinard.
(*) " Par les sommets, vers l'Au-delà " Jules Vinard, Fischbacher, 1914
(**) " Au Pays des Izards " George Cadier, Izarda, Osse, 1913
(***) " Toi, l’amant des Alpes, .. " Charles Bonzon, Pasteur, 1905-1994, fut de ceux qui surent montrer, dans la lignée des frères Cadier, la face de la montagne, que tant de nous, aimons ..

(@ Paris-Chamonix 1998)

Textes et illustrations déposés @ SGDL

Reproduction interdite sans accord de l'auteur

Méditations et Poésies